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Téléconsultation : un décollage difficile

par Rémy Teston

La 2e édition du baromètre B3TSI – Chronic Panel – Egora sur les usages de la téléconsultation médicale en France montre les difficultés du déploiement de la téléconsultation en France.

Prise en charge par l’Assurance Maladie depuis septembre 2018, la téléconsultation médicale décolle difficilement et les usages frémissent à peine. De plus, si elle a longtemps été présentée comme une réponse aux déserts médicaux, la téléconsultation séduit avant tout les plus jeunes, résidant en région parisienne ou dans les grandes agglomérations.

Pour la 1re édition du baromètre sur les usages de la téléconsultation médicale en France, on ne comptait, en novembre dernier, que 8 % de Français à avoir consulté à distance au moins une fois au cours des 12 derniers mois. La 2e édition du baromètre affiche un taux en hausse, avec 12 % de téléconsultants.

Mais cette hausse reste toute relative. Car si elle a été présentée comme un moyen de pallier les déserts médicaux, la moitié (52 %) des téléconsultations réalisées ont lieu dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants et même 27 % pour la seule région parisienne contre seulement 16 % en zone rurale, alors que cette part de la population représente 26 % de l’échantillon sondé.

Répartition des lieux d’habitation des Français ayant ou n’ayant pas téléconsulté

Les téléconsultations sont également le fait de patients jeunes. 48 % d’entre elles ont été réalisées par des Français ayant moins de 40 ans alors qu’ils ne représentent que 35 % de la population.

« Cet usage de la téléconsultation essentiellement urbain et jeune, invite à s’interroger sur le consumérisme médical » indique Alexis Bonis Charancle, Directeur associé de l’institut B3TSI avant de compléter : « Toutefois, si on se penche sur les motifs liés à cet usage de la consultation à distance, on ne peut pas réellement parler d’un développement consumériste. Bien que jeune et urbaine, la population utilisant la téléconsultation a des motifs tout à fait légitimes ».

De fait, les téléconsultants mettent plus de temps pour se rendre au cabinet de leur médecin traitant (14 % mettent plus de 30 minutes versus 6 % pour ceux n’ayant jamais téléconsulté dans les 12 derniers mois). 39 % ont eu recours aux services d’urgence d’un hôpital ou d’une clinique dans les mêmes 12 derniers mois (versus 21 % pour ceux n’ayant pas téléconsulté) et 42 % sont touchés par une maladie chronique ou permanente les obligeant à un traitement régulier (versus 33 % des non téléconsultants).

Autres éléments d’éclairage de cette nouvelle pratique de santé, pour la dernière téléconsultation réalisée, dans 41 % des cas, les personnes ressentaient une douleur et dans 48 % les délais de rendez-vous étaient trop long.

Pour le Dr Alain Trébucq, Président directeur général de Global Média Santé, éditeur d’Egora : «Cet usage urbain, correspondant à des délais de rendez-vous longs, montre combien il ne faut pas restreindre les notions de déserts médicaux, d’accès aux soins, aux seules zones rurales. Les évolutions démographiques et sociales, tant des professionnels de santé que de la population générale, impliquent de porter un regard neuf sur ce défi».

Un cadre de remboursement restrictif…

12 % des Français auraient donc déjà téléconsulté au cours des 12 derniers mois. Mais ces téléconsultations correspondent-elles à la définition de l’avenant 6 de la convention médicale ouvrant droit au remboursement ?

Tout d’abord, 70 % des Français ayant téléconsulté l’ont fait avec leur médecin traitant (54 %) ou un médecin recommandé par leur médecin traitant (16 %), rentrant ainsi dans le cadre de l’avenant. 8 % ont consulté un médecin recommandé par leur entourage, 14 % un médecin inconnu auparavant de sa propre initiative et 8 % un médecin proposé par leur mutuelle.

Mais seulement 30 % des téléconsultations ont été réalisées en vidéo, l’un des autres points clés ouvrant droit au remboursement.

Ainsi, si l’on recoupe ces deux critères, ce sont seulement 20 % des actes de téléconsultations qui correspondent à l’avenant 6 de la convention médicale…

…mais des Français satisfaits du service

Dans les mois et années à venir, la téléconsultation se développera-t-elle comme le souhaite le Ministère des Solidarités et de la Santé et l’Assurance Maladie ? Si l’on en croit le taux de satisfaction des personnes ayant déjà téléconsulté, il y a une forte chance.

Satisfaction vis-à-vis de la téléconsultation

Ainsi, ce sont plus de 7 Français sur 10 qui indiquent que la téléconsultation est au moins aussi bien que la consultation classique, 14 % la jugent même meilleure ou bien meilleure (contre 29 % estimant qu’elle est moins ou beaucoup moins bonne). D’autre part, 30 % sont prêts à la recommander à un proche (versus 17 % contre et 53 % de neutre).

Sur le versant de ceux qui n’ont pas téléconsulté lors des 12 derniers mois, ils sont 63 % à spécifier qu’ils utiliseront probablement ou certainement la téléconsultation (dans son mode conventionnel, par vidéo et avec son médecin traitant ou un médecin recommandé par celui-ci).

Au final, seuls 7 % des répondants sont tout à fait d’accord (note de 9 ou 10 sur une échelle de 10) avec l’affirmation selon laquelle la téléconsultation sera à terme le principal mode de consultation de leur médecin traitant.

Le niveau de connaissance et d’information sur la téléconsultation est-il suffisant pour la voir se développer rapidement ? 83 % des répondants indiquent ne connaître aucune plateforme de téléconsultation. Seul le site Doctolib émerge un peu, avec 8 % de notoriété spontanée sur ce type d’activité. Et même en proposant aux répondants une liste de plateformes, Doctolib conserve sa première place avec 67 % de notoriété assistée, suivi par Mesdocteurs (6 %), Doctoconsult et MédecinDirect (avec 5 % chacun).

2e édition du baromètre B3TSI – Chronic Panel – Egora sur les usages de la téléconsultation médicale en France. Enquête en ligne, réalisée en juin 2019, auprès d’un échantillon représentatif de la population française de 18 à 75 ans en termes de sexe, âge, csp du chef de famille, région et taille d’agglomération. Les différences indiquées sont significatives au seuil de risque maximum (α=0.05).

Source : B3TSI, Egora

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