La marque à la pomme poursuit ses investissements dans le domaine de la santé et préparerait un abonnement payant pour accéder à ses services santé. Analyse.
Apple préparerait un nouveau service payant baptisé « Santé+ », attendu en 2026. Selon plusieurs médias tech appuyés sur des informations de Bloomberg, l’application Santé d’iOS se doterait, en option, de fonctionnalités premium : un assistant « type médecin » dopé à l’IA, du coaching personnalisé, du suivi nutritionnel et des contenus pédagogiques en vidéo. L’angle est clair : monétiser l’immense base installée iPhone/Apple Watch en transformant des données jusque-là passives en recommandations actionnables. À ce stade, Apple n’a rien officialisé, mais la rumeur est jugée plus que « probable » par de nombreux médias.
Un indice structurel renforce cette hypothèse : la réorganisation annoncée en octobre qui place la santé et le fitness sous la responsabilité d’Eddy Cue, patron des Services. Or, c’est cette division qui pilote déjà les abonnements Music, TV+, News+, Fitness+ et iCloud+. Ce glissement organisationnel vers le P&L des services laisse penser qu’Apple s’apprête à « packager » de nouvelles briques payantes dans Santé, potentiellement intégrables à Apple One. Les timings évoqués convergent vers le printemps 2026 ou la WWDC de juin 2026.
Côté usages, le trio mis en avant par la presse spécialisée est constant : assistance « clinico-pédagogique » en langage naturel, journal alimentaire simplifié et programmes de bien-être pilotés par l’IA. L’objectif serait d’exploiter sur l’appareil (avec Apple Intelligence) les métriques captées par l’Apple Watch et l’iPhone pour fournir des conseils contextualisés, tout en rassurant sur la confidentialité. Ce positionnement, encore spéculatif, ferait de Santé+ un concurrent direct des apps de coaching existantes ,type Fitbit Premium, en capitalisant sur l’intégration native et la promesse de protection des données.
Pour l’écosystème, les enjeux sont multiples. D’abord, la cannibalisation potentielle des éditeurs tiers qui se branchent aujourd’hui sur Apple Health : si Apple « sherlocke » des fonctions clés (nutrition, coaching, éducation), la chaîne de valeur pourrait se déplacer vers l’abonnement propriétaire, poussant les apps concurrentes à se différencier par des niches cliniques, des preuves ou des services humains. Ensuite, la question du périmètre médical : tant que Santé+ reste dans le bien-être, le cadre est relativement souple ; dès qu’un « assistant IA » franchit la ligne du diagnostic ou de la prise en charge, s’ouvrent les sujets de conformité réglementaire (DM/DMN), de responsabilité et d’évaluation clinique. Les fuites de fonctionnalités parlent d’« IA doctor-like », mais la frontière entre coaching et avis médical reste, pour l’heure, floue.
En Europe et en France, l’atterrissage soulèvera trois défis concrets. Le premier est réglementaire : un module à visée médicale exigerait un marquage CE Dispositif Médical (ou un statut DMN avec exigences HAS) et une gouvernance des données conforme au RGPD et, demain, articulée à l’Espace européen des données de santé. Le second est techno-éthique : explicabilité des recommandations, maîtrise « on-device », consentement granulaire et absence d’incitation commerciale biaisant le conseil. Le troisième est partenarial : pour créer de la valeur clinique durable, un « coach » doit s’articuler aux parcours réels (médecin traitant, prévention, soins de premier recours) et, idéalement, s’appuyer sur des preuves d’impact en vie réelle, pas seulement sur l’UX. À défaut, Santé+ resterait un produit grand public sympathique, mais périphérique au système de soins.
Reste la question du prix et du bundle. Plusieurs médias évoquent un positionnement comparable aux offres de coaching existantes et une intégration possible à Apple One, sans confirmation officielle. Le pari d’Apple serait de monétiser une proposition « sécurité-simplicité-intégration » plutôt que des fonctionnalités inédites, en s’appuyant sur la confiance attachée à l’écosystème et à son traitement des données sensibles. Dans un contexte où l’usage quotidien de l’IA progresse, mais où la prudence règne côté santé, la disponibilité, la qualité des contenus et la lisibilité des limites du service seront déterminantes pour l’adoption.
À six à neuf mois d’un éventuel lancement, une chose est sûre : si Santé+ se confirme, 2026 verra s’ouvrir une nouvelle bataille, non plus seulement sur les capteurs et les montres, mais sur la couche « conseil » et l’orchestration des données personnelles de santé. Entre opportunité d’éducation sanitaire à grande échelle et risque de confusion sur ce qui relève du bien-être versus du médical, Apple jouera fin, et l’Europe regardera de près.
Sources : AppleInsider, Bloomberg