Panorama de la téléconsultation en France

La télémédecine a pris son essor en 2018 avec la prise en charge par l’assurance maladie des actes de téléconsultation pour tous les patients et sur tout le territoire depuis le 15 septembre. Décryptage de la téléconsultation en France.

Pour bien comprendre les enjeux du déploiement de la téléconsultation en France, il est nécessaire de commencer par une simple définition de cet acte de télémédecine et des objectifs associés.

Pour l’Assurance Maladie, « la téléconsultation est une consultation réalisée à distance d’un patient par un médecin (généraliste ou de toute autre spécialité médicale), le patient pouvant être assisté ou non, à cette occasion, par un autre professionnel de santé (ex : médecin, infirmier, pharmacien…) ».

La téléconsultation apporte de nouvelles solutions pour faciliter l’accès des usagers aux soins sur l’ensemble du territoire, y compris dans les zones en désertification médicale. Elle permet  notamment :

  • d’améliorer la prise en charge des patients, en évitant des renoncements aux avis spécialisés ou des délais de prises en charge trop longs
  • de simplifier le suivi des patients
  • d’éviter, pour les patients, des déplacements inutiles ou un recours aux urgences.
  • une prise en charge coordonnée entre professionnels de santé.

La téléconsultation concrètement comment ça marche ?

Le décret d’application défini clairement les modalités de mise en pratique de la téléconsultation.

« Tout médecin peut recourir à la téléconsultation, quels que soient : sa spécialité, son secteur d’exercice (secteur 1, secteur 2) et son lieu d’exercice, en ville ou en établissement de santé (cabinet de ville, maison de santé pluriprofessionnelle, centre de santé, Ehpad, hôpital, clinique…). Elle est réalisable partout en France métropolitaine et dans les départements et régions d’outre-mer. »

Toutes les situations médicales peuvent donner lieu à la téléconsultation, mais la mise en place relève de la seule décision du médecin (médecin traitant, médecin en accès direct ou médecin correspondant, selon les cas) qui doit juger de la pertinence d’une prise en charge médicale à distance plutôt qu’en face à face.

Il existe des conditions préalables à la téléconsultation :

  • Le médecin « téléconsultant » doit connaître le patient : il doit avoir eu au moins une consultation physique avec lui au cours des 12 derniers mois précédant la téléconsultation
  • Le parcours de soins doit être respecté : la téléconsultation s’inscrit dans le respect du parcours de soins coordonné donc le patient doit être orienté par son médecin traitant vers un médecin téléconsultant (si celui-ci n’est pas le médecin téléconsultant).

Les actes de téléconsultation sont facturés par le médecin téléconsultant au même tarif qu’une consultation en face-à-face. Les modalités de remboursement sont les mêmes que pour une consultation classique.

Ouverture des téléconsultations en officine

Pour permettre l’accès aux téléconsultations à l’ensemble de la population et bénéficier du maillage territorial des pharmacies, il a été décidé d’ouvrir les téléconsultations en officine.

Prévue par l’avenant conventionnel n°11, la téléconsultation est désormais précisée dans l’avenant n°15, signé le 6 décembre 2018 par l’Assurance maladie. Cette avancée conventionnelle apporte une solution concrète aux personnes âgées et aux personnes fragiles qui peuvent rencontrer des difficultés d’accès aux soins. Elle permet à ces patients d’accéder à leur médecin ou à l’hôpital par l’intermédiaire de l’équipement de la pharmacie de proximité, limitant ainsi leur déplacement.

Les téléconsultations devront être réalisées dans le respect du parcours de soins coordonné du patient avec un médecin traitant ou un médecin connu du patient. En leur absence, la téléconsultation sera mise en œuvre dans le cadre d’une organisation territoriale coordonnée (communauté professionnelle de territoire de santé ou équipe de soins primaires).

Toutes les pharmacies peuvent proposer une téléconsultation. Elles doivent disposer d’un espace de confidentialité et de différents équipements comme une visioconférence, un stéthoscope connecté, un otoscope connecté, un oxymètre et un tensiomètre.

Les acteurs de la téléconsultation en France

Pour exercer la téléconsultation en France, il est nécessaire d’obtenir un agrément auprès des ARS (Agence Régionale de Santé). L’obtention de cet agrément est soumise à différentes conditions : sécurité de l’hébergement des données de santé, égalité de traitement des patients, sécurisation des parcours de soins…

Lors de la mise en place du décret d’application de la téléconsultation, le gouvernement a annoncé des prévisions :  500.000 actes de téléconsultation en 2019, 1 million en 2020 puis 1,3 million en 2021. Ces prévisions attirent de nouveaux acteurs pour conquérir ce marché.

Un certain nombre de start up ont émergé et obtenu leur agrément : Medaviz, Mesdocteurs, Qare, Feelae, Medicitus, Zava… Elles appliquent les modalités définies en proposant au citoyen de suivre une consultation en ligne par écrit, téléphone ou vidéo, avec un professionnel de santé.

Ces nouveaux acteurs viennent s’ajouter à des acteurs historiques de la téléconsultation comme Médecin Direct. D’autres acteurs arrivent sur ce marché comme Doctolib qui a lancé début 2019 son service de téléconsultation.

Dans le cadre des modalités de mise en place de la téléconsultation, des téléconsultations peuvent être réalisées et facturées dans le cadre des « consultations externes » par les établissements de santé dans les mêmes conditions que les consultations en présentiel. Les prestations de téléconsultation sont juridiquement assimilées à des actes et consultations externes et répondent ainsi aux mêmes cadres juridiques et aux mêmes conditions de facturation.

Focus maladies chroniques : où en sont les usages ?

Penser suffisamment à l’avance au renouvellement de ses médicaments, attendre deux mois pour obtenir un rendez-vous chez son spécialiste, prendre rendez-vous en urgence chez son médecin généraliste… Être atteint d’une maladie chronique modifie le quotidien et nécessite souvent un suivi médical rapproché, obligeant à prévoir son emploi du temps, ce qui peut être très contraignant. La téléconsultation peut apparaître comme l’une des solutions amoindrissant les multiples contraintes rencontrées par les personnes atteintes d’une maladie chronique et favorisant la fluidité du parcours de soins.

Pourtant, l’enquête menée auprès du Chronic Panel de B3TSI montre que :

  • Seuls 8 % des personnes touchées par une maladie chronique ont déjà eu recours à la téléconsultation au cours des 12 derniers mois.
  • 92 % n’en ont pas encore fait l’expérience :

En moyenne, les personnes ayant eu recours à la téléconsultation consultent leur médecin traitant 5,4 fois par an contre 4,6 pour ceux qui n’ont pas téléconsulté au cours des 12 derniers mois.

Dans la même logique, ceux qui téléconsultent ont eu recours des spécialistes en moyenne 3,5 fois dans l’année contre 1,9 pour les autres.

Même constat chez les personnes ayant eu recours aux services d’urgence d’un hôpital ou d’une clinique : ils sont 30 % chez les personnes ayant déjà téléconsulté, contre 22 % chez les personnes n’ayant jamais fait appel à la téléconsultation.

Téléconsulter aujourd’hui : qui, comment, pourquoi ?

B3TSI s’est penché plus précisément sur les raisons pour lesquelles 8 % des répondants ont eu recours à la téléconsultation au cours des 12 derniers mois.

  • 66 % ont consulté un médecin généraliste et 30 % un médecin spécialiste,
  • 75 % ont effectué cette téléconsultation depuis leur domicile,
  • 49 % des répondants déclarent que la téléconsultation était le seul moyen d’accéder au médecin en question,
  • 39 % que c’était une situation d’urgence,
  • 37 % que le rendez-vous physique était trop lointain,
  • 20 % que leur médecin traitant était indisponible.

De plus :

  • dans 71 % des cas, les patients ont effectué une téléconsultation pour éviter de se déplacer,
  • 36 % pour éviter du stress,
  • 30 % pour éviter le déplacement en VSL (véhicule sanitaire léger) ou en ambulance.

Téléconsulter, est-ce aussi bien que consulter ?

La téléconsultation ne se résume pas seulement, comme on pourrait le croire, au téléconseil et se place aujourd’hui réellement dans le champ du parcours de soins des personnes malades chroniques y ayant eu recours.

Enfin, du côté de la satisfaction du patient, 10 % sont davantage satisfaits par une téléconsultation que par une consultation classique et 63 % estiment que les deux systèmes sont tout aussi satisfaisants.

Téléconsultation, vers des usages plus fréquents ?

La téléconsultation facilite donc le quotidien de certains malades chroniques. Le système évite le déplacement et le stress procuré par une organisation contraignante et permet surtout un accès au soin facilité et un suivi médical bien plus simplifié. Pourtant, le dispositif est encore très peu utilisé par les malades chroniques, principaux concernés par l’organisation du système de santé.

Et demain, qu’en sera-t-il ? Pour Alexis Bonis Charancle, directeur associé de B3TSI : « le véritable élément de réponse sera connu début juin prochain, avec la publication des résultats de la deuxième édition de cette enquête. 8 mois après la mise en place du remboursement de la téléconsultation, nous pourrons voir si les usages se développent réellement. Affaire à suivre donc… ».

Enquête réalisée sur la base du Chronic Panel de B3TSI, du 14 au 22 novembre 2018, auprès d’un échantillon national représentatif de 1 427 répondants malades chroniques.

Sources : Assurance Maladie, B3TSI 

Articles Similaires

Prix Galien France : ouverture des candidatures pour les prix 2024 !

Le 114 : un service d’urgence méconnu

La HAS publie des recommandations sur les lieux d’implantation des cabines de téléconsultation et de télésoin